SNBC 3 : une nouvelle feuille de route climatique de la France vers la neutralité carbone en cours de consultation
Green Hub
12/15/20255 min temps de lecture


Le 12 décembre, dix ans après l’adoption de l’Accord de Paris, le ministère de la Transition écologique a publié le projet de troisième Stratégie nationale bas-carbone (SNBC 3), ouvrant une phase de consultation publique en vue d’une adoption définitive au printemps 2026.
Véritable pilier de la planification écologique française, la SNBC constitue la feuille de route nationale pour lutter contre le changement climatique. Elle fixe les orientations permettant d’engager l’ensemble des secteurs économiques dans une trajectoire de décarbonation, tout en conciliant impératifs climatiques, économiques et sociaux.
Une trajectoire claire vers la neutralité carbone en 2050
La SNBC 3 définit une trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre jusqu’à l’atteinte de la neutralité carbone en 2050, en s’appuyant sur des budgets carbone successifs, véritables plafonds d’émissions à respecter à court et moyen terme.
Elle s’articule autour de sept grands objectifs structurants :
Réduire de moitié les émissions territoriales hors puits de carbone d’ici 2030, par rapport à 1990
Atteindre la neutralité carbone en 2050, malgré la dégradation du puits forestier et le besoin de développer des puits technologiques
Garantir la souveraineté énergétique et sortir des énergies fossiles, avec l'arrêt de la consommation de charbon dès 2027, de pétrole à l’horizon 2045 et la disparition du gaz fossile en 2050
Réduire l’empreinte carbone de la France
Consolider les puits de carbone naturels, notamment forestiers et agricoles
Garantir une transition juste et soutenable, socialement et économiquement
Réduire la consommation d’énergie finale, par la sobriété et l’efficacité énergétique
Une planification écologique au service de l’économie et des territoires
Lancée en 2022, la planification écologique vise à articuler la transition environnementale avec les impératifs économiques et sociaux. La SNBC 3 s’inscrit pleinement dans cette logique en apportant de la visibilité de long terme aux acteurs économiques sur les technologies vertes à développer et les investissements nécessaires à la décarbonation.
Fruit de trois années de travail collectif associant l’ensemble des ministères, les filières économiques, la communauté scientifique, les collectivités locales et les citoyens, la stratégie repose sur des hypothèses réalistes d’évolution des usages et des comportements. Elle mise notamment sur l’électrification des usages, l’amélioration de l’efficacité énergétique, la sobriété et la réduction du gaspillage.
La déclinaison territoriale de la SNBC est un élément central de sa réussite. Les leviers de la transition devront être adaptés aux spécificités locales afin de maximiser leur efficacité et leur acceptabilité sociale.
Des budgets carbone plus exigeants
La SNBC 3 fixe les budgets carbone pour les périodes 2024-2028, 2029-2033 et 2034-2038, en cohérence avec les objectifs européens et la nouvelle ambition climatique française. L’atteinte de ces budgets implique une baisse moyenne des émissions de gaz à effet de serre de l’ordre de 5 % par an d’ici 2030, contre environ 3 % en moyenne entre 2017 et 2023. Cette accélération traduit un changement d’échelle dans le rythme de la transition.
Des transformations sectorielles profondes
Dans les transports, premier secteur émetteur, l’objectif est de réduire les émissions de 26 % d’ici 2030 par rapport à 1990, pour atteindre ensuite une quasi-neutralité en 2050. Cette trajectoire repose sur une électrification massive du parc de véhicules, avec 15 % de voitures électriques dans le parc roulant en 2030 et près de deux tiers de véhicules électriques dans les ventes neuves. Elle s’accompagne d’un effort important de report modal pour le transport de marchandises, notamment vers le ferroviaire et le fluvial.
L’agriculture, qui représente environ 20 % des émissions brutes françaises, devra réduire ses émissions de 28 % d’ici 2030 et de plus de moitié à l’horizon 2050 par rapport à 1990. La SNBC 3 combine des leviers portant sur l’évolution des régimes alimentaires, la lutte contre le gaspillage, la réduction des intrants azotés, le développement de pratiques agroécologiques et le renforcement du stockage de carbone dans les sols et la biomasse agricole. La méthanisation et la sortie progressive des énergies fossiles dans les exploitations complètent cette trajectoire.
L’industrie est appelée à engager une transformation profonde, avec une réduction des émissions de 68 % d’ici 2030 et de 97 % en 2050 par rapport à 1990, hors recours aux technologies de capture et stockage du carbone. La SNBC 3 met en avant une réindustrialisation verte fondée sur la relocalisation de filières stratégiques, le développement du made in France et du made in Europe, ainsi qu’une augmentation continue de la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique industriel.
Dans le secteur du bâtiment, la stratégie repose sur un effort massif de rénovation énergétique. L’objectif est de rénover en moyenne 700 000 logements par an, dont 250 000 rénovations d’ampleur, afin de constituer à terme un parc majoritairement classé A, B ou C au diagnostic de performance énergétique. Les passoires énergétiques devront être éradiquées à l’horizon 2035-2040, tandis que le déploiement des pompes à chaleur atteindra près de 8,8 millions d’unités installées en 2030. La sortie du fioul et le remplacement progressif des chaudières à gaz s’inscrivent dans cette dynamique.
Le secteur de l’énergie devra garantir la disponibilité d’une offre décarbonée suffisante pour accompagner l’électrification des usages. Cela passe par une augmentation de la production d’électricité bas-carbone, le développement des bioénergies et la montée en puissance de l’hydrogène électrolytique. Les émissions du secteur devront être réduites de plus de deux tiers d’ici 2030 et de près de 96 % à l’horizon 2050 par rapport à 1990.
Consolider les puits de carbone naturels
La SNBC 3 accorde une attention particulière aux puits de carbone naturels, notamment les forêts et les sols agricoles. En 2023, ces puits absorbaient environ 37 Mt de CO₂e par an, mais cette capacité est en diminution depuis une décennie. L’objectif est de stabiliser le puits autour de 25 Mt en 2030 et de 24 Mt en 2050, ce qui suppose une adaptation des forêts au changement climatique et une gestion durable renforcée.
L’empreinte carbone, un changement de paradigme
L’introduction d’objectifs en empreinte carbone constitue l’une des principales innovations de la SNBC 3. En intégrant les émissions liées aux importations, la stratégie reconnaît la nécessité d’agir sur les modes de consommation et sur l’organisation des chaînes de valeur. L’empreinte carbone française, estimée à 563 Mt CO₂e en 2024, devra diminuer de près de 40 % d’ici 2030 et de plus de 70 % d’ici 2050 par rapport à 2010. Cette évolution reposera sur l’écoconception, le développement de l’économie circulaire, la sobriété matière et l’utilisation accrue de matériaux bas carbone.
Conclusion : des leviers opérationnels déterminants
La réussite de la SNBC 3 dépendra largement de sa mise en œuvre opérationnelle. À ce titre, le dispositif des certificats d’économies d’énergie jouera un rôle clé, en particulier dans les secteurs du transport et du bâtiment, notamment tertiaire. Les objectifs ambitieux fixés pour les pompes à chaleur s’inscrivent dans la continuité du plan gouvernemental annoncé en avril 2024 visant une capacité de production nationale d’un million d’unités dès 2027. La nouvelle fiche dédiée à la rénovation globale des bâtiments tertiaires constitue également un levier structurant pour atteindre les objectifs climatiques.
Avec la SNBC 3, la France se dote ainsi d’une stratégie climatique renforcée, articulant ambition environnementale, réindustrialisation et souveraineté énergétique. Le défi réside désormais dans la capacité collective à traduire cette feuille de route en actions concrètes, au plus près des territoires.
Lien du résumé du projet de la SNBC 3 : https://www.ecologie.gouv.fr/politiques-publiques/3e-strategie-nationale-bas-carbone-snbc-3


